Zinzin

La photo de classe

Sur la photo de classe

Juste assis à ma place

Il y a

Un garçon qui se tient

De guingois

Il me ressemble bien

C’est normal

C’est moi

Sur la photo de classe

Une tête dépasse

Il est grand

Cet enfant qui sourit

À belles dents

Pour mieux croquer la vie

Léopold

C’est lui


Sur la photo de classe

On distingue les traces

De morsures

Qu’il m’a fait à l’épaule

Je te jure

Que ce garçon est drôle

C’est sûr

Très drôle


Il m’a dit c’est pas moi

Je t’assure c’est Zinzin

Il m’a dit tu verras

Il est sympa mon chien

J’ai gardé sur le bras

La marque du câlin


Le premier jour de classe

On a mangé des glaces

La maîtresse

Nous les avait données

En promesse

D’une inoubliable année

Pour tous

Promesse

Promesse

Léopold est fou

« Va faire un tour, sois gentil

Tu déranges mes amis

Sois poli quand tu aboies

On se retrouve à midi

Je mangerai le pain gris

Le gruyère sera pour toi »

C’est ainsi quand Léopold

S’adresse à son chien

On entend bien les paroles

Mais on ne voit rien

Alors on dit de lui

Léopold est fou

Léopold le sait bien

Léopold joue le demi-doux

Léopold est zinzin

« Ah non! Zinzin,

c’est mon chien! »


« C’est d’accord, on a bien ri

Mais patauger sous la pluie

Ce n’était pas très malin

Tu as sali mes habits

Et puis après tu t’essuies

Sur le manteau du voisin »

Drôle de petit bonhomme

Qui parle avec rien

Ou bien est un chien fantôme

Une ombre un dessin

Alors on dit de lui


Léopold est fou

Léopold le sait bien

Léopold joue le demi-doux

Léopold est zinzin

« Ah non! Zinzin,

c’est mon chien ! »


Le vois-tu ce garçon

Qui joue seul dans la cour

Dans le fond

Il fait mine d’être sourd

Pour de bon

Quand quelqu’un rit de lui


Léopold est fou

Léopold le sait bien

Léopold joue le demi-doux

Léopold est zinzin

« Ah non! Zinzin, c’est mon chien ! »

Entrez

Qui est là ?

Je vous entends grogner

Ah ! Bonjour monsieur le chien

Entrez donc

Grimpez sur l’oreiller

Vous vous y sentirez bien

Justement j’ai un peu peur

ce soir

D’ailleurs je crois que j’ai peur tous les soirs

Entrez

Entrez je vous prie

Venez

Venez pour la nuit puis

Restez

Pour toujours

Et après vous partirez


Cher ami

Vous tombez à merveille

J’avais envie de parler

Cette nuit

J’ai besoin d’une oreille

Ou de deux, pour m’écouter

Justement je me sens seul ce soir

D’ailleurs je me sens tout seul tous les soirs


Entrez

Entrez dans ma vie

Venez

Venez mon ami puis

Restez

Pour toujours

Et après c’est fini

Restez

Pour toujours

Et après vous partirez

Piétiner les fleurs

Vois-tu

Dit gentiment le père

J’ai eu

L’idée du tonnerre

On va faire un bouquet pour ta maman

C’est bon

Je maîtrise l’affaire

Allons

Chercher dans son parterre

Les jolies fleurs

qu’elle chérit tant

Tiens

On dirait qu’on a piétiné

Les hortensias et les rosiers

Qu’est-ce qui a bien pu se passer

C’est navrant

Tiens

On voit des traces de souliers

Au milieu des tiges brisées

Pense à bien essuyer tes pieds

En rentrant


Je crois

Qu’il était en colère

Le gars

Qui a jeté des pierres

Dans les semis d’automne

de ta maman

On peut

Détester ses manières

Mais nous deux

Nous avons mieux à faire

On va tout ressemer pour le printemps


Tiens

On dirait qu’on a piétiné

Les hortensias et les rosiers

Qu’est-ce qui a bien pu se passer

C’est navrant

Tiens

On voit des traces de souliers

Au milieu des tiges brisées

Ce sont vraiment les petits pieds

D’un enfant

Tiens

Il a fait ça pour rigoler

J’espère qu’il s’est amusé

Et qu’il ne s’est pas fait gronder

En rentrant

Je ne dors pas

Léo est-ce que tu dors

Il fait tout noir dehors

Et sous les draps

Léo à quoi tu penses

Aimes-tu les vacances

Ici chez moi

Léo est-ce que tu dors

Pour de vrai moi j’adore

Quand tu es là

Léo à quoi tu penses

J’entends un gros silence

Qui vient de toi

Je ne dors pas

J’écoute le vent qui se vante

Il a volé des échos là-bas

De la voix de ma maman qui chante

Je ne dors pas

Je tends l’oreille pour l’entendre

Peut-être que quand on l’opér’ra

Il y aura

un orchestre de chambre

La nuit n’a pas sommeil

La nuit n’a pas sommeil

Elle chuchote et Léo tend l’oreille

Il dort mais c’est pareil

Son cœur s’agite avant qu’il ne s’éveille

Et ça fait...

D’abord c’est un beau rêve

Dans le lointain une voix qui s’élève

Chanté du bout des lèvres

Un air très doux mais qui donne la fièvre

Et ça fait...


Et puis c’est un concert

Des fleurs géantes emplissent le parterre

Est-ce un bouquet mystère

Autour de lui le dance-flore se resserre

Et ça fait...


Après c’est un cauchemar

Pensées, soucis, mourons et nénuphars

Des ronces des renoncules des crocus des immortels en cortège

Des oeillets et des iris

qui le regardent et qui le fixent comme un affreux

perce-neige

Les bleus matins d’hiver

Le pain grillé

Un peu brûlé autour

Une odeur qui rend heureux

Et qui lui rappelle

Le jour délicieux

Où sa maman est rentrée

Le châle usé

Qu’elle gardait toujours

Malgré la chaleur du feu

Tout ça lui rappelle

Les jours merveilleux

Qui ont suivi son retour

Il se souvient comme d’hier

De ces doux moments à deux

Il revoit bien dans la lumière

Les divers matins heureux

Il souvient de la lumière

De ces bleus matins d’hiver


Bien installé

Assis sous l’abat-jour

Le divan rien que pour eux

Le temps immobile

À scruter les yeux

De sa maman qui dormait

Les jours passés

Lui ont paru bien courts

Malgré les jeux silencieux

Car il se rappelle

Les moments précieux

Qui ont suivi son retour


Il se souvient comme d’hier

De ces doux moments à deux

Il revoit bien dans la lumière

Les divers matins heureux

Il souvient de la lumière

De ces bleus matins d’hiver

Quelque chose

Quelque chose vient de changer ce matin

Comme un souffle, un courant d’air

Quelque chose qui fait rêver, c’est certain

Comme quand on dit « j’espère »

Et sous la peau depuis des jours

Cogne le cœur comme un tambour

C’est le printemps

Le retour du beau temps

C’est le printemps

Le bonheur à plein temps

Quelque chose vient de pousser au jardin

Les premières primevères


Quelque chose vient me pousser, et soudain

Je revois la vie en vert

Ou bien mes yeux me jouent des tours

J’y vois plus clair et tout autour


C’est le printemps

Le retour du beau temps

C’est le printemps

Le bonheur à plein temps

Salut

Salut Léo

Peux-tu me faire une fleur

J’aurais besoin

D’un beau bouquet en couleur

C’est un cadeau

Que j’offrirai tout à l’heure

À deux bons copains

Chers à mon cœur

Tu sais Léo

Je ne te l’ai jamais dit

Grâce à Zinzin

Un jour j’ai compris ceci

Que ce qu’il faut

Ce qui compte dans la vie

C’est avoir au moins

Un vrai ami